Les niveaux de compétence

dernière modification de cette page : 20/03/2021

Introduction

Afin de décrire ce qui est attendu des internes au cours du troisième cycle de médecine générale, des niveaux de compétence ont été décrits. Ce travail est issu d'un consensus d'experts.

On distingue des niveaux génériques et des niveaux spécifiques à chacune des six compétences. Le parcours de développement de chaque compétence est divisé en trois niveaux : novice, intermédiaire et compétent, correspondant aux trois niveaux attendus au cours du cursus de troisième cycle de médecine générale. Pour chaque niveau sont déclinés trois à dix descripteurs précisant ce qui est attendu de l’interne. Chaque descripteur est explicité par des indicateurs sous la forme « On attend qu’il ... » décrivant ce qui devra être recherché dans les performances observées et rapportées ou dans les traces écrites d’apprentissage pour inférer le niveau de compétence.

Les niveaux génériques

L'interne novice (de l'entrée dans le DES à la moitié du stage de niveau 1) :

  • Possède des notions sur les spécificités de la discipline et les compétences nécessaires à acquérir pour exercer la MG,
  • Accepte a minima le projet proposé,
  • A conscience qu’il opère sur l’être humain,
  • Est apte à supporter une part d’incertitude,
  • A conscience de la difficulté (complexité) des problèmes auxquels il va être confronté,
  • Envisage qu’il va devoir couvrir l’ensemble du champ de la discipline (champ et fonctions) 
  • Montre un début de questionnement sur sa pratique antérieure et actuelle.

L'interne intermédiaire (de la moitié du stage de niveau 1 à la moitié du SASPAS) :

  • Est en mesure de faire le lien entre théorie enseignée et la pratique observée et /ou exercée (identifie les capacités, connaissances, habiletés nécessaires à l’exercice de la compétence),
  • A pris conscience de ce qui est demandé et participe activement à son propre développement,
  • Améliore sa capacité d’autonomie en s’appuyant sur une meilleure confiance en soi (prenant progressivement de l’assurance).

L'interne compétent (fin de cursus / après le SASPAS) :

  • Agit en autonomie et assume ses responsabilités,
  • Collabore efficacement avec les autres intervenants,
  • Possède une approche centrée patient ,
  • S’interroge sur sa pratique.

Premier recours, incertitude, urgences

Capacité à gérer avec la personne les problèmes de santé indifférenciés, non sélectionnés, programmés ou non, selon les données actuelles de la science, le contexte et les possibilités de la personne, quel que soit son âge, son sexe, ou toutes autres caractéristiques, en organisant une accessibilité (proximité, disponibilité, coût) optimale.

L'interne novice :

  • Accepte toutes les plaintes qui lui sont faites, en particulier du champ biomédical.
  • Evoque et identifie les grandes urgences vitales et sait prévenir les structures d’urgences pour les adresser dans les services adéquats.
  • Prend conscience de l’amplitude du champ d’activités possibles en exercice ambulatoire et s’interroge sur ses capacités à y faire face.

L'interne intermédiaire :

  • Recueille, accepte sans rejeter et analyse les demandes explicites les plus fréquentes, tente de les gérer en repérant la demande réelle en essayant de les hiérarchiser dans une vision centrée maladie plus que patient et tenant compte des prévalences liées au contexte.
  • Fait des tentatives de repérer la demande réelle derrière la plainte alléguée, en essayant d’intégrer les antécédents et le contexte de vie du patient ; mais peine à élargir sa vision centrée maladie et a besoin de soutien sous la forme de supervision pour se centrer patient.
  • Décide sans avoir systématiquement obtenu un diagnostic de maladie et accepte d’en parler au patient.
  • Etend peu à peu le champ de ses capacités interventionnelles et fait bénéficier de façon pertinente les problèmes ou situations de patients qui nécessitent une intervention extérieure.
  • Elargit le contenu de la consultation à la prise en compte d’autres problèmes de santé.
  • Accepte l’idée que les demandes urgentes recouvrent aussi des urgences ressenties.

L'interne compétent :

  • Fait face aux plaintes les plus prévalentes de premier recours en mobilisant des ressources internes et externes permettant leurs résolutions.
  • S’organise pour faire face aux plaintes les plus prévalentes de premier recours en participant aussi à la permanence de soins.
  • Fait des diagnostics de situations
  • Evoque les stades précoces des maladies et en dehors des situations d’urgence se donne le temps (cf suivi).
  • Evoque la possibilité de symptômes bio médicalement inexpliqués (SBI)
  • Elargit le champ de la consultation aux autres dimensions de la consultation et aux autres problèmes de santé en programmant éventuellement des actions de prévention en accord avec le patient.
  • Gère les urgences ressenties par le patient.
  • Collabore avec les autres intervenants et assume ses responsabilités.

Approche globale, prise en compte de la complexité

Capacité à mettre en œuvre une démarche décisionnelle centrée patient selon un modèle global de santé (evidence based medicine, approche bio-psycho-sociale proposée par Engel, etc.), quel que soit le type de recours de soins dans l’exercice de médecine générale.

L'interne novice :

  • Explore certains aspects de la situation clinique en les segmentant de façon analytique et en privilégiant l’aspect bio médical aux dépens des aspects psycho sociaux.
  • Utilise le temps de la consultation et de l’examen clinique pour le recueil des données principalement bio médicales.
  • Entrevoit qu’il existe des données psycho sociales, culturelles, éthiques, juridiques et administratives dans la démarche décisionnelle et qu’il est nécessaire de les prendre en compte.
  • Accepte l’idée que s’occuper du patient ne se réduit pas à se centrer sur sa maladie mais que cette démarche n’est pas évidente pour lui.
  • Cherche à améliorer ses connaissances pour trouver la bonne réponse à une situation.

L'interne intermédiaire :

  • A conscience qu’une situation clinique ne peut pas se réduire au diagnostic médical et qu’il est nécessaire d’intégrer d’autres aspects pour comprendre et gérer cette situation clinique.
  • Tente de passer du diagnostic médical à un diagnostic qui intègre une partie du contexte sans pour autant qu’il s’agisse d’un diagnostic de situation (voir le référentiel métier compétence).
  • Lors d’une consultation il peut utiliser certaines notions de psychologie médicale afin de mieux comprendre le sens de ses propres réactions et celles du patient dans le but d’aider ce dernier
  • Est en mesure de réévaluer une situation, de changer d’analyse de cette situation lors des recours suivants pour intégrer de nouvelles données après réflexion.
  • Change de registre pour comprendre mieux la situation et modifie sa posture initiale si besoin.
  • A conscience qu’il existe des temporalités différentes entre le médecin et le patient dans toutes les situations, en particulier en cas de discordance (temps nécessaire à chaque patient).
  • Accepte l’idée qu’il existe plusieurs réponses acceptables en fonction des différentes analyses possibles. De ce fait, prend en compte une partie de la complexité en situation. Reconnaît la place de l’incertitude dans la démarche décisionnelle.

L'interne compétent :

  • Dans les situations habituelles, tient compte des données émanant de plusieurs champs et de plusieurs sources, tente de les intégrer dans une décision centrée patient.
  • Prend le temps nécessaire et suffisant pour explorer une situation. Laisse le temps au patient   de métaboliser.
  • Gère simultanément plusieurs problèmes de nature différente en les hiérarchisant.
  • Utilise le temps comme allié, comme une aide à la décision en adéquation avec la situation du patient.
  • En fonction des situations, est en mesure de modifier sa posture.
  • Dans les conditions habituelles, de complexité modérée, est capable de mettre en place une relation de soutien, à effet psychothérapeutique bénéfique pour le patient
  • Fait la différence entre incertitude personnelle et incertitude professionnelle

Education, prévention, dépistage, santé individuelle et communautaire

Capacité à accompagner « le » patient dans une démarche autonome visant à maintenir et améliorer sa santé, prévenir les maladies, les blessures et les problèmes psychosociaux dans le respect de son propre cheminement, et donc à intégrer et à articuler dans sa pratique l’éducation et la prévention.

L'interne novice :

  • Accepte la place et l’importance des différentes composantes de cette grande compétence dans l’activité du généraliste,
  • Définit ce que recouvrent les 3 niveaux de prévention de l’OMS, primaire, secondaire et tertiaire,
  • Possède des notions de ce que recouvre l’éducation du patient avec ses 3 niveaux d’activité, du plus général au plus spécifique : l’éducation pour la santé du patient, l’éducation du patient à sa maladie et l’éducation thérapeutique du patient (se reporter aux définitions dans le mode d’emploi).
  • Se sent responsable de la gestion de la santé du patient.
  • Argumente ses propositions dans le but d’obtenir l’adhésion du patient, par une approche logique centrée sur son propre raisonnement et sans tenir compte des représentations du patient.

L'interne intermédiaire :

  • Réalise des consultations dédiées à la prévention en les intégrant aux soins à partir de la demande du patient et de ses contraintes de médecin.
  • Réalise les démarches et gestes de prévention dans les situations les plus simples.
  • Repère et exprime ses difficultés à changer de posture de soignant.
  • Cherche la collaboration et le soutien de l’entourage familial pour aider le patient.
  • Travaille avec d’autres intervenants impliqués dans la prévention et l’éducation du patient.

L'interne compétent : 

  • Intègre couramment dans son activité de soins et dans la durée des moments dédiés à la prévention individuelle, au dépistage organisé et à l’éducation du patient.
  • Clarifie les tensions entre enjeux individuels et collectifs de la prévention pour rechercher l’adhésion du patient.
  • Collabore activement avec d’autres intervenants impliqués dans la prévention et l’éducation du patient.
  • Accompagne le patient dans une démarche d’éducation à sa santé (posture d’éducateur).

Continuité, suivi, coordination des soins autour du patient

Capacité à assurer la continuité des soins et la coordination des problèmes de santé du patient engagé dans une relation de suivi et d’accompagnement.

L'interne novice :

  • Fait volontiers appel à d’autres intervenants sur des critères décisionnels centrés sur le biomédical et le médecin
  • Met en place une relation médecin malade basée sur une posture expert « haute » et perçoit ses limites.
  • Se rend disponible pour la permanence des soins.
  • Transmet les informations nécessaires à la continuité des soins.
  • Utilise et prend en compte les informations des autres intervenants.
  • Accepte l’idée qu’il va être amené à revoir les patients.
  • Utilise le dossier médical

L'interne intermédiaire :

  • Construit une relation dans le temps en essayant de faire participer le patient à la décision et à la démarche.
  • Met en œuvre une relation avec les intervenants, en particulier paramédicaux et médicosociaux, en adaptant les moyens de communication et d’information à la situation et à l’intervenant avec lequel il communique (cf. communication).
  • Utilise et renseigne le dossier médical dans une optique de suivi.
  • Fait le lien entre les différents moments ponctuels de recours.
  • Utilise le temps dans la démarche décisionnelle dans certaines situations.
  • Prend en compte les problèmes et les plaintes afin d’organiser le suivi.

L'interne compétent : 

  • Conçoit que le patient a une histoire personnelle et une vie qui déterminent ses traits de caractère et qui influencent le type de suivi
  • Utilise le temps comme allié, comme une aide à la décision en adéquation avec la situation du patient
  • Analyse les avis des différents intervenants, les synthétise pour prendre une décision centrée patient
  • Utilise le dossier médical pour programmer un suivi dans une perspective, de promotion de la santé au niveau individuel et collectif, de prévention et de dépistage.
  • Hiérarchise les plaintes et les problèmes et établit un suivi centré patient.
  • Choisit les intervenants en accord avec le patient selon des critères bio-psycho-sociaux.
  • Collabore à la continuité et la coordination du maintien à domicile.
  • Participe à l’organisation de l’accessibilité aux soins y compris lors de ses absences.

Relation, communication, approche centrée patient

Capacité à construire une relation avec le patient, son entourage, les différents intervenants de santé, ainsi que les institutionnels, en utilisant dans les différents contextes les habiletés communicationnelles adéquates, dans l’intérêt des patients.

L'interne novice :

  • Accepte l’idée qu’il doit entrer en relation avec le patient pour exercer la médecine générale
  • Connait quelques fondements théoriques de la communication, la différence entre relation et communication
  • Connaît les caractéristiques fondamentales de la relation médecin malade.
  • Identifie les difficultés inhérentes à la mise en pratique des habiletés relationnelles et communicationnelles et repère que l’acquisition des compétences et des capacités dans le domaine de la relation et de la communication doivent faire l’objet d’une formation.
  • Mène un entretien directif, interprète les données avec une grille de lecture majoritairement de nature « bio médicale », y perçoit des limites en termes de perception et de compréhension de la situation clinique.
  • Communique avec l’entourage des patients à partir de ce qu’il pense être important pour le patient.
  • Communique avec différents intervenants en utilisant différents médias.
  • Utilise principalement une communication verbale.
  • Explique les décisions et espère obtenir l’adhésion du patient.

L'interne intermédiaire :

  • Identifie les données communicationnelles et relationnelles qui participent à la démarche décisionnelle
  • Dans l’analyse d’une consultation, peut utiliser certaines notions de psychologie médicale afin de mieux comprendre le patient et le sens de ses réactions (voir aussi approche globale et complexité)
  • Dans les situations courantes, construit une relation en s’appliquant à utiliser les habiletés d’une communication centrée patient.
  • Accepte l’idée que l’on ne peut tout aborder et tout régler dans le temps d’une seule consultation
  • Communique avec l’entourage du patient, en utilisant les mêmes habiletés qu’avec le patient, en étant attentif au secret médical
  • Met en œuvre une relation avec les intervenants (y compris paramédicaux et médicosociaux) en adaptant les moyens de communication et d’information à la situation et à l’intervenant avec lequel il communique.
  • Repère et exprime ses difficultés relationnelles et communicationnelles.

L'interne compétent : 

  • En dehors des situations très complexes, mène en autonomie un entretien centré patient et structure ce dernier.
  • Dans les conditions habituelles, de complexité modérée, est capable de gérer les émotions, de rester empathique et respectueux.
  • Dans les conditions habituelles, de complexité modérée, est capable de mettre en place une relation de soutien, à effet psychothérapeutique bénéfique pour le patient.
  • Lors de situations et/ou de relations qui posent problème (agressivité, séduction, sympathie, rejet, etc.) construit et tente de maintenir la relation tout en se questionnant sur la nature de celle-ci.
  • Communique sur ses erreurs en tenant compte de l’avis du patient et en acceptant d’être remis en cause.
  • Dans les conditions habituelles, réfléchit à sa capacité communicationnelle avec le patient et  son entourage.
  • Met en œuvre avec les intervenants médicaux, médicosociaux et l’entourage du patient, une relation opérationnelle dans l’intérêt du patient.

Professionnalisme

Capacité à assurer l’engagement envers la société et à répondre à ses attentes, de développer une activité professionnelle en privilégiant le bien être des personnes par une pratique éthique et déontologique, d’améliorer ses compétences par une pratique réflexive dans le cadre de la médecine basée sur des faits probants, d’assumer la responsabilité des décisions prises avec le patient.

L'interne novice : 

  • Entrevoit un projet professionnel.
  • Accepte son rôle d’interne.
  • Présente un engagement altruiste envers le patient.
  • Participe aux formations théoriques et pratiques du D.E.S.

L'interne intermédiaire :  

  • Prend conscience de besoin d’acquisition permanente de nouvelles connaissances afin d’améliorer ses compétences.
  • Définit des objectifs de formations en fonction de son projet professionnel.
  • Organise son temps de travail.
  • Manifeste un engagement pour la médecine générale.
  • S’occupe du patient avec altruisme, honnêteté, dans le respect des règles déontologiques.

L'interne compétent :

  • Assume sa responsabilité envers le patient et la société.
  • Collabore avec les autres soignants.
  • Organise son outil et son temps de travail.
  • Améliore ses compétences.
  • Prend en charge le patient avec altruisme.
  • S’implique dans le rayonnement de la discipline.